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Pill. A biography of the drug that changed the world (The)

Bernard ASBELL, 1995

410 p. $ 25

Considérer la pilule comme un médicament et prétendre écrire la biographie d’une substance mortifère donne, dès son titre, le ton de l’ouvrage. Mais l’auteur n’en est pas à cela près puisque c’est tout simplement une hagiographie qu’il nous livre. Cette pilule est sacrée. Les maux dont on l’accable ne sont évidemment que de malveillants ragots ; elle a ses prophètes (Margaret Sanger), ses mécènes éclairés (Katharine Mc Cormick), ses martyrs (Dr. Anne BIezanek, stigmatisée par la hiérarchie catholique). Comme toute découverte digne de son rang, elle est née d’une conjonction de volonté et de hasard, elle a surmonté les obstacles administratifs et bigots les plus invraisemblables, pour enfin remplir sa mission : sauver les femmes de toute détresse. Elle n’en ressortira pas indemne, mais, ô victoire, sa résurrection lui est promise sous une autre forme : le RU 486 d’un chimiste altruiste au possible, Etienne-Emile Baulieu, père des peuples du tiers-monde auxquels ils apporte la libération de la maternité non-désirée et les portes de la prospérité économique et sociale, il va sans dire (le chapitre 21 n’est rien moins qu’une apologie du programme chinois de contrôle des naissances).
Au passage, des anecdotes, quelques remarques retiennent notre attention.
On découvre ainsi que Gedeon Richter - la firme hongroise pressentie par le Population Council (lui même impliqué dans le développement de la «pilule» dès les origines (p. 157) pour fabriquer la version américaine du RU 486) - s’était impliquée dès 1946 dans la fabrication des hormones de la reproduction (p. 101).
Les pages 347 à 368, consacrées au Pr. Baulieu, affirment que l’homme, à seize ans, s’engagea dans la résistance - toujours le besoin de héros.
On redécouvre que la «pilule contraceptive» dont il est question dans ce livre, et dont l’auteur cache soigneusement le fonctionnement statistiquement abortif, a d’abord été autorisée comme agent de régulation de la menstruation (p. 159 et suivantes), c’est à dire comme abortif déguisé.

En somme, le travail de Ellen Chesler pèche non par distorsion mais par omission. Le portrait hagiographique qui nous est rendu l’est par un tri soigneux des informations. L’intérêt de l’ouvrage, pour le mouvement pro-vie, réside donc dans le fourmillement d’informations (nominatives ou non) sur le mouvement du contrôle des naissances américain et international, informations véridiques mais simplement incomplètes. A titre d’exemple, l’auteur raconte avec d’intéressants détails les débuts de l’IPPF à Londres, mais «omet» un détail peut-être plus «gênant» que les autres, le fait que la nouvelle organisation s’implanta dans les locaux de la Société eugénique. Ou encore, l’abandon du stérilet aux Etats-Unis au milieu des années 70 est expliqué par des considérations médicales uniquement, l’auteur passant curieusement sous silence l’épisode du scandale du Dalkon Shield, un stérilet défectueux qui, parce qu’il avait été interdit aux Etats-Unis, fut envoyé (en vrac, sans emballages !) dans les pays en voie de développement avec l’argent du contribuable américain et dans le cadre des programmes de contrôle des naissances dont Margaret Sanger se fit l’avocate.
Finalement, l’eugénisme et le malthusianisme flagrant de Margaret Sanger étaient tels qu’ils transparaissent tout de même malgré le traitement sélectif de l’information auquel Ellen Chesler les soumet; mais c’est probablement parce que l’auteur semble chercher à ménager avant tout non pas Margaret Sanger, mais l’IPPF et la Fédération Américaine du Planning Familial. Après tout, des structures pratiquant chaque année plusieurs centaines de milliers d’avortements et de stérilisations temporaires ou permanentes de toutes sortes n’ont probablement pas peur de bafouer l’honneur d’une morte pour se dégager elles-mêmes des soupçons qui pèsent sur leurs épaules...
On notera une excellente bibliographie (plus de 300 références, en particulier celles des articles et ouvrages de Margaret Sanger), ainsi qu’un bon index des noms propres.
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