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Changer la mort ?

Léon Schwartzenberg, 1977

Albin Michel
258 p. 85 FF

Léon Schwartzenberg n’est pas un homme ordinaire. Ancien cancérologue agnostique et anti-conformiste, il a consacré les dernières décennies de sa vie à réclamer la dépénalisation de l’euthanasie. Mais dans ce domaine, la résistance morale de la société est certaine, bien qu’imparfaite. En 1977, Léon Shwartzenberg devait tout inventer et commencer par le début, c’est à dire d’abord banaliser (au sens propre) l’euthanasie, c’est à dire la présenter comme une option parmi d’autres, moralement neutre, banale.» Changer la mort» est écrit dans ce ton. Léon Schwartzenberg n’y réclame ouvertement aucune dépénalisation de l’euthanasie. Mais les seize histoires «vraies» qui ouvrent l’ouvrage, et qui mettent en scène des grands malades héroïques ou effondrés devant la mort, les uns stoïques et les autres suppliant (obtenant ou non) le geste qui les «libérera», constituent finalement le coeur de l’ouvrage et sa justification. Que l’auteur égratigne au passage ses adversaires (ou supposés tels - notamment les salauds de médecins opposés par principe à l’avortement qui, en fait, comme chacun sait, sont ceux qui forcent les femmes à avorter en cas d’anomalie foetale (p. 39)) a finalement peu d’importance et dessert l’auteur plus qu’autre chose. Que les pratiquants de l’euthanasie soient présentés comme des héros, qui ont tenu jusqu’au devoir accompli pour un fils, un mari, n’a somme toute rien d’étonnant. Qu’aux yeux de Schwartzenberg le bon prêtre fut celui qui ne proposa au mourant aucun sacrement (p.36) et même (p. 50) celui qui priva expressément sa mère de l’extrême-onction qu’elle réclamait ne surprend pas vraiment. Le reste (description du cancer ou de l’approche médicale du malade) n’est que divertissement.
Vraiment, l’ouvrage dément l’adage selon lequel «dans la queue le venin». Ici, l’essentiel tient dans les quarante premières pages, ces «seize histoires vraies», hélas !. Dans cette banalisation réussie, d’où le lecteur sort affaibli après qu’en jouant sur la corde sensible - qui ne serait insensible à la détresse humaine dans la souffrance des derniers instants - l’euthanasie lui eut été présentée sous un jour tellement neutre qu’on finira par se dire «pourquoi pas ?».
«Ce n’est pas à un vieux singe qu’on apprend à faire des grimaces». Toute opération de chirurgie commence par une désensibilisation et Léon Schwartzenberg le sait bien. Plus tard viendra le temps d’avancer les projets de lois. En 1977, nous n’en sommes pas là.
Assurément, s’il faut connaître ce que l’on prétend combattre,» Changer la mort» mérite d’être lu.
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