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#8 1999.08.14
 

Avortement

France : le Gouvernement assimile les militants pro-vie à des extrémistes antisémites

Le 23/06/1999, dans le but prévisible d'impressionner la résistance pro-vie en vue d'une modification de la loi dans un sens plus laxiste encore, le Gouvernement s'est prêté avec complaisance à une question du député Guy Hascoët sur des propos injurieux et antisémites qu'aurait reçu le Pr. Nissand, auteur d'un rapport partisan sur l'avortement (cf. nos précédentes éditions) - campagne antisémite qui, selon le député, aurait été orchestré par "Droit de naître", une organisation-satellite de Tradition-Famille-Propriété. Martine Aubry a prétendu avoir été elle-aussi l'objet de menaces de mort et d'insultes antisémites.

Au-delà du procédé dialectique de diabolisation des opposants pro-vie, la question fut également le prétexte pour le Ministre de la Solidarité d'expliquer qu'elle "regrette aussi que l'interruption volontaire de grossesse, dont nous sommes tous d'accord pour penser qu'elle doit être le dernier recours, que tout doit être fait pour l'éviter et qu'il faut développer la contraception pour ne pas en arriver là, ne soit pas pratiquée partout sur le territoire comme elle devrait l'être".
 

Texte de la question au Gouvernement et réponse de Madame le Ministre de la Solidarité

« 

IVG et contraception

J.O. A.N. (C.R.) n° 61 - 2e séance du mercredi 23 juin 1999

M. le président. La parole est à Guy Hascoët.

M. Guy Hascoët. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le 19 mars dernier, madame la ministre, vous avez rendu un rapport public commandé au professeur Nisand sur « l'IVG en France ». Cette étude souligne l'actuelle discontinuité du service public en ce domaine et dresse la liste des inégalités rencontrées par les femmes dans l'accès tant à la contraception qu'à l'avortement. En conclusion, elle énonce vingt-cinq propositions pour y remédier.

Alors que le Gouvernement termine de planifier les mesures qu'il a choisies pour répondre à ce défi, le pro-fesseur Israël Nisand fait l'objet d'une campagne d'insultes antisémites et de menaces de mort, orchestrée en sous-main par « Droit de naître », une association filiale de Tradition-Famille-Propriété,...

Mme Nicole Bricq. Quelle horreur !

M. Guy Hascoët. ... qualifiée de « mouvement sectaire » par le rapport de notre collègue, Jacques Guyard.

Pourriez-vous indiquer à la représentation nationale, madame la ministre, par quelles mesures concrètes et selon quel échéancier le Gouvernement entend venir en aide aux femmes en détresse, particulièrement aux mineures, aux étrangères, aux femmes hors délai ? Pour maintenir une égalité d'accès aux soins, le Gouvernement prévoit-il des programmes d'éducation et de sensibilisation aux différents modes de contraception ? Par ailleurs, nous ne doutons pas que le Gouvernement défende l'autorité de la République et la sécurité de ses agents lorsqu'elle est menacée en raison de leurs fonctions. Aussi, pourriez-vous indiquer à la représentation nationale comment le Gouvernement entend soutenir juridiquement et protéger le professeur Nisand ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, je vous remercie de cette question car le professeur Nisand, qui nous a remis un rapport sur la manière d'améliorer la prise en charge de l'IVG dans notre pays pour les personnes en grande difficulté, c'est-à-dire tout simplement d'appliquer la loi de 1975, fait en effet l'objet, comme d'autres personnes dont moi-même, de menaces de mort, et en ce qui le concerne, de manifestations antisémites et d'insultes particulièrement déplacées. Je regrette que, vingt-cinq ans après le vote de cette loi, il y ait encore, dans notre pays, des femmes et des hommes pour proférer les mêmes insultes que celles que Mme Veil avait dû entendre ici. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Je regrette aussi que l'interruption volontaire de grossesse, dont nous sommes tous d'accord pour penser qu'elle doit être le dernier recours, que tout doit être fait pour l'éviter et qu'il faut développer la contraception pour ne pas en arriver là, ne soit pas pratiquée partout sur le territoire comme elle devrait l'être, quand une autre solution n'est pas possible - je le répète, l'objectif étant toujours, selon le Gouvernement, de rechercher une autre solution.

Le professeur Nisand nous dit, et nous ne pouvons que nous en réjouir, que la loi que Mme Veil a fait voter n'a pas contribué à banaliser l'IVG, contrairement à ce que certains craignaient. Mais il nous dit aussi qu'il reste encore des publics en grande difficulté, des femmes en situation de grande précarité qui ont dépassé les dix semaines de gestation, des jeunes filles qui n'arrivent pas à obtenir l'autorisation paternelle ou maternelle, et que le service public n'est pas toujours et partout à la hauteur.

C'est sur ses propositions que nous travaillons dans l'esprit de la loi de 1975. Mais avec Nicole Péry et Ber-nard Kouchner, nous entendons annoncer en même temps des mesures destinées à promouvoir la contraception, car l'important est d'éviter l'interruption volontaire de grossesse. Une grande campagne sera lancée car on constate que, chez les jeunes, aujourd'hui, le nombre d'IVG augmente, le préservatif ayant souvent remplacé la contraception sans en avoir l'efficacité. Nous avons renégocié avec les laboratoires pharmaceutiques en ce qui concerne les pilules de troisième génération et de façon que le RU 486 continue à être produit en France et que la pilule du lendemain soit disponible à un tarif abordable dans l'ensemble des pharmacies.

C'est donc bien l'ensemble du problème qui doit être traité, comme le pense d'ailleurs le professeur Nisand, à qui j'ai affirmé hier encore personnellement que le Gouvernement était à ses côtés et que, bien évidemment, il l'accompagnerait financièrement et politiquement s'il décidait de porter plainte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

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